jeudi 14 février 2008

Potosi, ou toute l'inhumanité de la colonisation...

Après avoir fait un tour par le sud de la Bolivie (Tupiza, puis Tarija), nous voici enfin à Potosi. Qui n'a pas entendu parlé une fois au moins de Potosi et de sa célèbre montagne, le jackpot de l'empire colonial espagnol, le Cerro Rico ?

Dès le début de la colonisation, les Espagnols exploitent les énormes quantités d'argent qui dormaient alors dans le ventre de la montagne. Contraints et forcés, un nombre incalculable d'indigènes, puis d'esclaves africains, meurent dans ces mines pour enrichir l'Europe. Les richesses des mines de Potosi sont tellement extraordinaires que Charles Quint élève la cité au rang de ville impériale en 1555 (la seule du Nouveau Monde). Exploité durant trois siècles, le Cerro Rico aurait produit suffisament d'argent que pour paver du précieux métal une route à deux voies jusqu'à Madrid !!! Historiens et économistes donnent même à l'argent de Potosi un rôle prépondérant dans le processus de la formation primitive du capital en Europe, condition nécessaire à la révolution industrielle capitaliste du vieux continent.

Sur l'emblème actuel de la Bolivie, il y a le Cerro Rico. Symbole ambigu, celui-ci rappelle les richesses du pays, mais aussi son histoire tragique. Le Cerro Rico, c'est la richesse de l'Occident, la balafre de la Bolivie.

Bien que trouée dans tous les sens (façon de parler heureusement) et que son exploitation ne soit plus vraiment rentable, le Cerro Rico est toujours exploité par des coopératives privées.

À l´heure actuelle, les mineurs y travaillent toujours dans les conditions les plus difficiles et des plus précaires. Ils ne jouissent d'aucune assurance, ni sécurité sociale. Peu d'entre eux vivent plus de 45 ans. S'ils ne meurent pas dans un accident de travail, ils meurent de silicose. Il paraît qu'en 1996, un mineur est arrivé à l'âge de la retraite... Ça a fait la Une des journaux...


Les mineurs doivent également acheter à leur frais le matériel qui leur est nécessaire pour travailler. Deux mètres de mêche pour la dynamite, c'est dix minutes de course pour se mettre à l'abri. Les mineurs les plus pauvres ne peuvent s'en acheter autant... Ici, si tu es pauvre tu dois courir vite !!!









A la lumière du jour, les mineurs sont catholiques, mais dans la mine ils craignent El Tio, le diable qui règne depuis toujours sur les mines... C'est que le syncrétisme est fort en Bolivie.

Au fond de chaque veine, il y a une statue d'El Tio. Les mineurs lui offrent cigarettes, alcool et bières... En ce qui concerne les libations de bière et d'alcool, c'est pour la richesse, l'amour ou la santé selon que ce soit sur le pied gauche, le phallus en érection ou le pied droit du diable...









Potosi, c'est une région plus pauvre, les gens sont un peu triste et la misère se ressent beaucoup... Ici, sur les places et dans les lieux publics, on ne chante pas la gloire des conquistadores et les libertadores du pays comme en Argentine et au Chili. Quand les Argentins ou les Chiliens rendent hommage aux conquistadores et aux libertadores, ils rendent hommage à leur ancètres européens. En Bolivie, c'est différent, la grande majorité de la population est composée d'indigènes qui ont souffert et qui souffrent encore. Pour eux, ce qui est européen est un mauvais souvenir !!! Ils célèbrent plutôt le souvenir de Che Guevara et les actions et projets socialistes du premier Président bolivien indigène, Evo Morales...

Sur ce mur d'une rue de Potosi est inscrit : "Un peuple d'hommes éduqués sera toujours un peuple d'hommes libres, l'éducation est l'unique moyen de se sauver de l'exclavage"

Aucun commentaire: